• Ghosts

    J'ai peur, parfois, de finir par me mettre moi aussi en mode automatique, comme ces silhouettes sans visage que je croise le matin et le soir, aux heures de déjeuner, celles qui échangent des mots qui sortent d'eux-mêmes, des banalités que l'habitude impose à leur cerveau en veille. J'ai peur de me faire engloutir dans le monde de ces gens qui ont mis de côté leurs rêves et leurs fantaisies, leurs passions et leurs espérances, tout ce qui les rendait singuliers, tout ce qui animait leurs traits de jeune être tourné vers l'avenir. Mon enthousiasme se brise au contact de ce quotidien insipide qui, même s'il tente de se renouveler de lui-même, ne change jamais assez pour produire du nouveau. Pourtant je vois bien ceux qui font des efforts pour renouveler sans cesse, pour animer, ils font des ronds de jambes et brassent de l'air avec la meilleure volonté du monde, mais rien n'y fait; je n'arrive pas à oublier le vide qu'ils essayent de cacher derrière eux.
    Est-ce que nous sommes tous voués à oublier ce qui nous faisait vibrer, avant, à nous contenter qu'un quotidien bien rempli, de joies passagères et de rares instants d'émotion, concentrés dans les quelques et si rares heures qui n'appartiennent qu'à nous? Le temps défile tellement vite, je ne me rappelle pas de la semaine dernière, je n'ai le temps de rien, et tous mes projets s'envolent, je n'ai même plus l'occasion d'y penser. Ce mode de vie qu'on nous impose est malsain, quelque part, il nous occupe l'esprit et fait s'envoler le temps comme si nous nous ennuyons trop pour nous occuper nous-mêmes, comme si notre vie serait vide sans de telles obligations. La mienne était bien remplie, je ne savais même plus où donner de la tête, et j'ai peur aujourd'hui de devoir tout repousser à des échéances qui reculeront sans cesse, puisqu'il n'y a pas d'échappatoire possible. Est-ce qu'il existe un compromis quelque part, est-ce qu'on peut encore s'évader tout en étant enchaîné ici bas, est-ce qu'il reste de la place aux rêves? Je ne veux pas me mêler des banalités dans l'ascenceur du matin, ni des discussions de comptoirs; j'ai besoin de chimères, je ne vis que pour m'émouvoir.

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :